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LA FAUSSE VÉRITÉ
ou comment le matraquage médiatique tient lieu de vérité
Analyse critique du livre : Louis XVII, la vérité
On ne présente plus lauteur M. Delorme, journaliste vedette de la Presse couronnée. Dans son livre modestement intitulé Louis XVII, la vérité (Éditions Pygmalion, Paris, 2000), il retrace ses efforts pour imposer sa thèse de soutien à lHistoire officielle. A-t-il réussi ? A vous den juger.
Au rebours dune certaine méthode qui construit sur le sable en parlant dodyssée confuse et de fouille miraculeuse nous allons nous appuyer sur le roc de la certitude objective.
Remarque préalable
Toute étude sur laffaire Louis XVII doit prendre en compte deux faits incontestables
- Le 3 juillet 1793 à 23h00, lenfant âgé de huit ans est arraché à sa famille : il est hors de doute quil sagit bien de Louis XVII mais cest la dernière fois quon pourra laffirmer. En toute rigueur, il faudra parler ensuite de lenfant du Temple, expression qui ne présume en rien de lidentité réelle de lenfant.
- Le squelette trouvé au cimetière Sainte Marguerite est celui de lenfant mort au Temple le 8 juin 1795 et autopsié le lendemain. Les examens ostéologiques en 1894 par un groupe déminents médecins -que le docteur Petrie qualifie de fine fleur de la médecine parisienne à lépoque (J.H.Petrie, Lodewijk XVII-Naundorf, een mysterie ontrafeld, De Bataafsche Leeuw, Amsterdam, 1995, p. 91)- qui ont retrouvé les traces dune part des atteintes scrofuleuses aux endroits indiqués par le rapport dautopsie et dautre part, les coups de scie du docteur Pelletan conformes à la description quil en a faite lui-même.
Cest là une preuve scientifique sans appel de cette identité (Philippe A. Boiry, On tue encore Louis XVII, Presses de Valmy, Paris, 2000, chap. V à VII, pp. 54 à 84). Les commentaires de M. Fleury ny ont rien changé (Maurice Étienne, Les dernières fouilles au cimetière Sainte-Marguerite, in La Presse et Louis XVII, Jacques Hamann, Tome X, 1998, p.171). Dailleurs, le docteur Petrie en fait tant de cas quil ne les reprend même pas dans sa thèse.
Continuer de prétendre donc que Louis XVII est mort au Temple et que sa dépouille a été jetée dans une fosse commune où on ne peut la retrouver consiste à nier une vérité scientifiquement démontrée.
Il découle de ces deux constatations que tout chercheur qui prétendrait dune part, que lenfant du Temple après le 3 juillet 1793 est toujours Louis XVII doit en apporter la preuve et dautre part son raisonnement, sil admettait que Louis XVII est mort au Temple le 8 juin 1795 et y a été autopsié le lendemain, reposerait sur des bases scientifiquement fausses et serait sans valeur.
Toute étude sur Louis XVII qui ne tient pas compte de ces deux conditions préalables est faussée au départ et ses conclusions nulles et non avenues.
De plus, une remarque dordre général simpose, à savoir, quil ne faut jamais prendre les témoignages de lére révolutionnaire au pied de la lettre. Lépoque ne prêtait pas à la sincèrité : trop de gens mentaient par instinct de conservation. On ne peut donc les considérer quavec une pincette dans une main et une grosse loupe dans lautre.
Pelletan : un faux témoin
Parlant de son geste lors de lautopsie, Pelletan déclare :
- page 30 : Je ne courais pas de grands risques (sa déposition de 1817) ;
- page 48 : Je navais pas couru le moindre risque
. je ne craignais pas dêtre fouillé en sortant (à la duchesse dAngoulême) ;
- page 103 : Jespérais bien quon ne saviserait pas de me fouiller en sortant de la maison
. Il me félicita de ma témérité (le 13 juin 1816, en parlant du docteur Lassus, décédé en 1807) ;
- page 119 : Vous savez quil pouvait y aller de ma vie (mai 1817, dans une letttre au docteur Dumangin, toujours vivant à lépoque).
Il ressort clairement de ces déclarations que Pelletan varie sans vergogne ses dires selon les circonstances et suivant ses interlocuteurs :
Pelletan nest pas un témoin crédible.
Mais il y a pire. Tout dabord en ce qui concerne les visites de Pelletan à lenfant du Temple, le médecin déclare :
- page 124 : Dès la maladie de Desault, je fus nommé pour continuer les secours
(dans Préliminaire du Mémoire de 1814)
- page 102 : Jai été appelé pour donner les secours de lart
.pendant la maladie et après la mort de M.Desault
.Il y avait douze à quatorze jours que je visitais lenfant lorsquil succomba le 8 juin 1795 (dans son Exposé du 13 juin 1816)
Pelletan ment effrontément. Le docteur Desault est décédé le 13 prairial an III (1er juin 1795). Il a été nommé par un arrêté du Comité de Sûreté Générale en date du 17 prairial an III (5 juin 1795). Beauchesne cite larrêté du Comité de Sûreté Générale en date du 17 prairial comme nommant Pelletan en charge de continuer les soins (Beauchesne, Louis XVII, Plon, Paris, 1872, Tome II, Livre XVIII, pp. 316 à 326)..
En outre, Beauchesne (op. cit.) retrace les visites du docteur Desault en date des 10 prairial (29 mai) et 11 prairial (30 mai), durant lesquels ce médecin a agi et parlé tout à fait normalement. Ceci exclut totalement dune part que Desault ait été malade avant son décès et dautre part quun autre médecin, Pelletan ou autre, ait été appelé au Temple pour visiter lenfant.
Qui plus est, Beauchesne (op. cit.) cite la proposition du Comité des Secours au Comité de Sûreté Générale afin de pourvoir au remplacement de Desault, texte qui cite Pelletan mais ne fait aucune allusion à des soins quil aurait donnés à lenfant.
Ajoutons dailleurs que le docteur Pelletan, ne pouvant entrer au Temple par la fameuse porte des écuries pour aller donner des soins à lenfant, devait bien se présenter à la porte principale de la prison. On ne la franchissait que muni dune autorisation. Or il découle de ce qui précède que Pelletan na eu cette autorisation que le 17 prairial (5 juin).
Il lui a donc été impossible de se rendre auprès de lenfant avant cette date.
Dans sa déposition de 1817, Pelletan ne craint pas de déclarer : Je visitais le roi trois fois par jour (page 30). En 1795, il nappelait certainement pas lenfant le roi !
Là encore, il ment. Beauchesne a retracé les visites de Pelletan (op. cit.) : il sest rendu auprès de lenfant le 5 juin dans laprès-midi, et les 6, 7 et 8 juin, une fois par jour entre 8h00 et 9h00 le matin.
La conclusion est claire : Pelletan ne dit pas la vérité, du moins pas toujours, et pas rien que la vérité.
Pelletan est un faux témoin.
Le pieux larcin
Affirmation sans preuve
Cest Pelletan qui a prétendu sêtre saisi du cur de lenfant autopsié le 9 juin 1795. Cest lui qui opéra, ainsi quil est précisé en page 102 : Étant particulièrement chargé de lopération de louverture et de la dissection
(dans son Exposé de 1816). Il déclare :
- page 102 : ...Je me hasardai à memparer du cur de lenfant
(dans son Mémoire de 1816) ;
- page 30 :
.Josai memparer du cur
. (dans sa déposition de 1817).
Mais Pelletan nétait pas seul dans la pièce où sest pratiquée lautopsie. Y assistaient aussi trois autres docteurs (Dumangin, Lassus, Jeanroy), le commissaire Damont, le gardien Lasne, et peut-être encore dautres personnes (Les commissaires Darlot, Bigot et Bouquet sont aussi mentionnés par Beauchesne (Louis XVII, Plon, Paris, 1872, Tome II, p. 328).. Ces témoins corroborent-ils les dires de Pelletan ?
- Docteur Jeanroy : nous navons connaissance daucune déclaration du docteur Jeanroy à ce sujet. M. Delorme dit à son sujet quil disparut sans doute avant lEmpire (page 36).
- Le gardien Lasne : cest sans doute lui que Pelletan dénomme le concierge dans sa déposition de 1817 (page 30). Interrogé par Beauchesne, Lasne sera formel : il a toujours refusé de croire à lauthenticité du cur de Pelletan. Beauchesne précise : (Il) avait assisté à lautopsie, et (
.) navait pas, disait-il, quitté un seul instant lopérateur (page 30). Il faut cependant préciser à notre tour que Lasne est lui-même un faux témoin : Me Jules Favre en apportera les preuves irréfutables, tirées des propres paroles du personnage, dans sa plaidoirie (Louis XVII, plaidoirie de Maître Jules Favre, Librairie Internationale, Paris, 1891, pp. 191 à 208).
- Docteur Lassus. En page 36, Pelletan dit : Josai soustraire le cur et je nen fis part quà M.Lassus
(dans son Mémoire de 1816). Mais Lassus est décédé le 7 mars 1807, à Paris (Cercle dÉtudes Historiques sur la Question de Louis XVII, Cahiers Louis XVII, N° 10 Spécial, janvier 1997, p. 34) et ne sest jamais exprimé à ce sujet.
- Docteur Dumangin. Dans une note datée de 1817, annexée à ses Preuves authentiques de la mort du jeune Louis XVII, lhistorien A. Antoine de Saint-Gervais (page 39) écrit : M.Dumangin atteste quà la fin de lopération il a vu M.Pelletan envelopper soigneusement quelque chose quil mit dans sa poche. Il na nullement songé à ce que ça pouvait être, et il présume que ce chirurgien a pu juger convenable de faire alors un mystère de ce pieux larcin, non seulement de peur de se compromettre, mais encore de compromettre celui quil en eût rendu confident. Aujourdhui, quoique rien ne puisse prouver physiquement que ce soit réellement le cur de Louis XVII que M.Pelletan ait en sa possession, quil ne peut en donner dautre garantie que sa parole, M.Dumangin, se rappelant ce qui sest passé lors de louverture du corps, dit que dans son âme et conscience, il est moralement convaincu de la vérité du fait. Nous examinerons ci-après la qualité du témoignage de Dumangin, mais nous pouvons remarquer dès à présent quavec ses réticences il sonne comme un témoignage de complaisance.
Cette impression se renforce dans la lettre que Dumangin écrit le 1er mai 1817 à Pelletan, dans laquelle il sexprime ainsi sur cette affaire :
.dans linstant où vous dites avoir soustrait une partie précieuse du jeune roi. Dans ce courrier, il ny a plus la moindre complaisance : Dumangin nie avoir été témoin du geste et doute même de sa réalité.
La différence réside dans le fait que la lettre avait un caractère privé alors que lattestation de complaisance avait été prononcée devant un tiers.
On peut observer que dans son attestation, Dumangin laisse entendre quil est possible que Pelletan ait soustrait quelque chose - dont il se garde bien de préciser la nature -, ce que lon peut attribuer à un geste de piété envers la monarchie (geste dautant plus douteux que Pelletan était un révolutionnaire affirmé), et donc excusable. En niant son geste devant un tiers, alors que lon était sous la Restauration et quil était de notoriété publique que Pelletan voulait faire accepter ce cur par la famille royale et quil ny parvenait pas, il laurait tout simplement accusé de crime de lèse-majesté. Les deux médecins ne saimaient pas, mais pas au point que lun envoie lautre à léchafaud.
Notons en outre que Dumangin est lui aussi un menteur. Dans sa lettre à Pelletan en date du 1er mai 1817, il affirme :
. Des devoirs communs nous ont appelés constamment ensemble au Temple (page 117). Or, Dumangien a été nommé comme adjoint de Pelletan le 9 prairial (7 juin 1795), la veille de la mort de lenfant, et ce matin-là les deux médecins allèrent ensemble au Temple ; ils convinrent dy aller le 10 prairial (8 juin), Pelletan à 8h00 et Dumangin à 11h00. Dumangin fit donc en tout et pour tout deux visites au Temple, dont une seulement avec Pelletan : voici comment se réduisent les prétentions de Dumangin (Beauchesne, op. cit., pp. 320-321).
- Le commissaire Damont. Dans sa déposition du 6 août 1817, Damont déclare :
Je priai M.Pelletan de me donner des cheveux
(page 37). Dans sa déposition du 16 août 1817, il est plus précis :
Il le pria de lui donner quelques-uns de ses cheveux ; ce quil fit, en prenant des précautions pour que son action ne fût pas remarquée de M. Dumangin
(page 38).
Cette dernière déposition prouve dailleurs que le docteur Dumangin na rien vu et que son attestation était de pure complaisance.
Cest, dit lauteur, à la suite de ces dépositions que Damont est venu trouver Pelletan pour lui demander une authentification de ses reliques capillaires (page 38). Nous sommes alors en pleine histoire du cur et lauteur prend la démarche de Damont pour une reconnaissance au moins implicite des prétentions du docteur (page 38), alors que deux lignes plus loin il constate que ni Lasne, ni Damont nont vu Pelletan semparer du précieux viscère. Comment Damont pourrait-il donc donner une reconnaissance, même implicite, dun geste de Pelletan dont il na pas été témoin ? Ce raisonnement tient du délire !
En un mot comme en cent, la démarche de Damont na aucune signification en ce qui concerne le cur.
Aucun témoignage ne vient donc corroborer la prétention de Pelletan de sêtre emparé du cur de lenfant. Pelletan étant, en soi, un faux témoin, il est hautement douteux que Pelletan ait pris le cur.
Ceux qui ont vu le cur
- Le docteur Lassus : Pelletan dit dans son exposé de 1816 quil lui fit confidence de son larcin (page 103). Il ne précise pas sil lui a montré lorgane en question.
- Tillos : En page 42, Pelletan sexprime ainsi à son sujet : Les grands orages de la révolution étant calmés, jeus limprudence, un jour, de montrer ce cur, en même temps que dautres pièces que mon tiroir renfermait, à un M.Tillos, mon élève particulier
- Abbé Lafont dAussone : Dans une note datée du 15 juillet 1836, cet ecclésiastique déclare :
le docteur Pelletan, bien avant la chute de Bonaparte, mavait montré le cur de Louis XVII
(page 135).
- Comtesse de Clermont-Tonnerre : En page 127, il est dit, daprès un écrit de Pelletan : Madame la comtesse de Clermont-Tonnerre
a vu ce cur.
De ces quatre personnages, seul Lassus aurait pu authentifier la relique, le cas échéant. Mais il est décédé en 1807, sans avoir rien dit. Quant aux trois autres, ils ne tirent leur connaissance que des propres paroles de Pelletan et ils étaient tous dans limpossibilité absolue, avec la plus parfaite bonne foi, de vérifier ses dires.
Ces témoignages ne prouvent en rien que le cur montré ait été celui de lenfant autopsié.
La comédie Tillos
Le docteur Pelletan dit avoir proposé à la veuve de Tillos un reçu pour disculper la mémoire de son mari du vol du cur (page 43). Mais cette restitution se déroulait en cercle privé, et la veuve Tillos ne lui demandait rien ! Le geste charitable de Pelletan vise en réalité un tout autre but : cest la première fois que ce cur apparaît par écrit et il est déclaré comme étant le cur de Louis XVII.
Or sur quoi repose cette identification ? Une fois de plus sur la seule parole de Pelletan, lequel, nous lavons démontré, est un faux témoin.
À la fin de ce reçu, Pelletan ajoute : Le procès-verbal de louverture et autres pièces qui y sont relatives fourniront la preuve de ces faits. Ce sont là les paroles dun escroc : il veut faire prendre les vessies pour des lanternes. Les pièces dont il parle prouvent seulement quil a participé à louverture du corps. Mais cela, personne ne la jamais nié ! Par contre, elles napportent aucune preuve que Pelletan se soit emparé du cur, ni que le garçon autopsié ait été Louis XVII.
Il est dailleurs remarquable que ce reçu soit daté du 23 avril 1814 (page 128). À ce sujet, nous prenons de nouveau Pelletan en flagrant délit de mensonge puisque dans sa Narration à Mgr de Quelen, datée de 1828 (page 135), il écrit : Madame la duchesse dAngoulême devait paraître la première
Or ceci est faux. Voici la chronologie des événements : Le 6 avril 1814, le Sénat appelle Louis Stanislas Xavier de Bourbon sur le trône de France ( Pelletan a donc attendu plus de quinze jours encore pour écrire ce reçu !). Louis Stanislas ne quitta sa résidence dHartwell, en Grande-Bretagne, que le 20 et sinstalla à Compiègne le 29 avril : la duchesse dAngoulême ne lavait pas quitté depuis Mitau en 1799 et elle entra à ses côtés à Paris le 3 mai 1814 (G.Bordonove, Louis XVIII, Pygmalyon, Paris, 1989, pp. 131 à 141). Le comte dArtois, nommé Lieutenant Général du Royaume par son frère, était pour sa part arrivé à Paris dès le 12 avril (J.Orieux, Talleyrand, Flammarion, Paris, 1970, p. 582).
Dautre part, dans son Mémoire de 1816, Pelletan dit : Je nosai pas réclamer le cur (page 43). Cette affirmation du médecin est dénuée de toute crédibilité : Comment, ayant constaté le vol et sachant que seul son élève avait pu le commettre, nest-il pas allé le trouver pour le lui réclamer entre quatre yeux ? Tillos aurait alors bien dû le lui restituer, sans avoir le temps de le détruire, ce qui réduit à néant largumentation de Pelletan. Là encore, Pelletan ment : il avait dautres curs à sa disposition mais les Bourbons sont de retour depuis quelques jours. Doù son idée doffrir à la veuve Tillos un reçu qui authentifie (sic) le cur.
Odyssée rocambolesque dun cur
Le sac de lArchevêché
Ce cur ne sera jamais accepté par la famille royale. La fable selon laquelle cest la révolution de 1830 qui lempêcha de donner suite à loffre de Pelletan nest tout simplement pas crédible. Il y avait alors 16 ans que ce cur lui était offert ! La vérité est donc que la famille royale na jamais ajouté foi aux prétentions de Pelletan.
Le viscère est donc déposé à lArchevêché de Paris, sous la sauvegarde de Mgr de Quelen, le 23 mai 1828 (page 58). Las ! LArchevêché est pillé par des émeutiers le 29 juillet 1830 et lorgane disparaît. Mais il est miraculeusement retrouvé par Pelletan fils, lui aussi médecin, quelques jours plus tard (page 66). Il le reconnaît : Il avait encore conservé son odeur desprit-de-vin. Cette dernière particularité na rien de vraiment caractéristique : toutes les pièces anatomiques à lépoque étaient préparées de la sorte et nous savons que Pelletan père, professeur danatomie (page 31), possédait ses propres collections de pièces anatomiques, et notamment dans son tiroir (page 42).
Sagit-il toujours du cur de 1814 ? Nous nen avons aucune preuve.
Un cur qui bouge et se déforme tout seul
Le cur remis à don Carlos, à Frohsdorf, fit de la part de ce dernier lobjet dune décharge, accompagnée dune note décrivant minutieusement lurne, datée du 22 juin 1895.
Sur les photographies publiées à lépoque (Revue rétrospective, 1894), on voit très bien en effet lorgane très haut dans le vase, tout contre le couvercle. Les morceaux de cristal sont parfaitement visibles, reposant sur le fond du vase.
Sur les photos publiées en avril 2000 (Ph. Delorme, op. cit., p. 136), les morceaux de cristal ont disparu. Le cur est situé beaucoup plus bas dans lurne et lon voit nettement un petit cylindre attenant au couvercle. Lorgane est suspendu par un fil ténu. Qui plus est, la forme du cur lui-même nest plus la même : il est plus oblong quen 1894. Or, il est impossible quun organe devenu aussi dur que le bois se soit pareillement déformé sous leffet de son poids.
Ces constatations résultent du travail minutieux effectué par Laure de La Chapelle, vice-présidente du Cercle dÉtudes Historiques sur la Question de Louis XVII.
Il est curieux de constater que M. Delorme sabstient de reprendre dans son livre la photo de lurne de 1894. Pourquoi ?
Dautre part, en page 90, lauteur parle de la tâche délicate de disjoindre les deux hémisphères du vase de cristal, qui ont été hermétiquement scellés - sans doute vers 1975, époque du retour du reliquaire en France. Il en découle quentre 1895 (transport vers lItalie du cur caché derrière la cravate du convoyeur et 1975 soit pendant quatre-vingts ans, rien ne prouve que lurne ait été scellée, ouvrant la porte à tous les abus. On croit faire un cauchemar ! Dans ces conditions, la conclusion surgit delle-même :
Aucune garantie ne subsiste que lorgane contenu dans lurne soit le cur qui y avait été replacé en 1830.
DES ÉTUDES FAITES SUR UN MATÉRIAU AUSSI DOUTEUX NE PEUVENT PAS PLUS SE QUALIFIER DE SCIENTIFIQUES QUE DHISTORIQUES.
Un deuxième cur à Frohsdorf
M.Delorme nous raconte en page 69 que les héritiers de Pelletan firent contacter M.Barrande, ancien précepteur du comte de Chambord, à qui ils font remettre une notice à ce sujet, en date du 5 juin 1883. Mais le comte décède le 24 août 1883, sans avoir pris de décision.
Le comte de Chambord na jamais reçu le cur dit de Pelletan.
Laure de La Chapelle rappelle une lettre du Père Bole, confesseur du comte de Chambord, à son collègue le Père de Boylesve, en date du 17 octobre 1885. Ce prêtre écrit : Ce cur, Monseigneur la reçu après avoir fait examiner toutes les pièces et documents qui en constatent lauthenticité.
M. Delorme prétend que le verbe recevoir peut avoir aussi le sens daccepter, et que dautre part le Père Bole a pu se tromper et penser que les tractations de 1883 avaient abouti, ce qui, nous venons de le voir, nest pas le cas (Site Internet Forum de lHistoire/Révolution française, en date du 20 mai 2001).
Le comte de Chambord naurait jamais conduit de telles négociations du vivant de la duchesse dAngoulême sans son accord. On peut donc situer lévénement entre 1851 et 1883.
En français les mots ont un sens. Le dictionnaire Robert donne pour le verbe recevoir les définitions suivantes : I. (Sens passif). Se voir adresser (quelque chose). II. (Sens actif). Laisser entrer ou venir à soi, donner accès. Il sagit là de personnes ou dobjets matériels. Le sens daccepter ou dagréer ne semploie quau niveau des idées ou, dans le judiciaire, pour une requête à un tribunal.
Le cas qui nous occupe concerne un cur, donc un objet matériel. Le texte du Père Bole est donc sans ambiguïté : le comte de Chambord a bien reçu matériellement un cur, présenté comme celui de Louis XVII, et qui nest pas celui dit de Pelletan. Il est même vraisemblable que le prêtre, confesseur du prince, a lui-même vu ce cur. Il na donc pas pu se tromper, dautant que ses souvenirs sont encore frais deux ans seulement après la mort du prince.
Il y a eu un cur, dit de Louis XVII, à Frohsdorf avant 1895.
Le cur du Premier Dauphin
Louis Joseph François Xavier, le Premier Dauphin, est décédé à Meudon le 4 juin 1789. Son corps a été autopsié et, selon la coutume, son cur a été mis à part pour être conservé.
Ce cur a-t-il été embaumé ? M. Delorme laffirme en page 174 : Les curs princiers, avant dêtre déposés au Val-de-Grâce, subissaient un traitement de thanatopraxie. À lappui de ses dires, il cite deux procès-verbaux dembaumement, le premier pour le cur de la Dauphine Marie-Anne-Victoire de Bavière, décédée en 1690, le second pour celui du comte de Provence, en date du 17 septembre 1824. Ces deux documents prouvent quà chaque embaumement, un procès-verbal de lopération était dressé.
Or il nexiste pas de procès-verbal dembaumement du cur du Premier Dauphin.
Cette absence à elle seule ôte toute crédibilité à laffirmation que cet organe aurait bien subi ce traitement. Dautant que le texte de 1690 est explicite : Le cur, après avoir été vidé, lavé avec de lesprit-de-vin et desséché... Ce début de traitement correspopnd exactement au processus que nous décrit Pelletan pour la conservation de son cur en page 42. Rien donc ninterdit de penser que pour nombre de curs princiers les opérations se soient arrêtées là, et notamment pour celui du Premier Dauphin, en plein début de période révolutionnaire.
Il est intéressant de noter que, dans cette hypothèse, le cur du Premier Dauphin présenterait les mêmes apparences que le cur dit de Pelletan.
Le cur du Premier Dauphin a bien été déposé au Val-de-Grâce, mais cet édifice a été pillé par la lie révolutionnaire en octobre 1793. Un avocat le recueillit alors et il était déposé en 1817 à la mairie du 5ème arrt (actuel). Depuis, la trace en a été perdue.
Supposer par conséquent que les analyses ont été pratiquées en réalité sur le cur du Premier Dauphin est une hypothèse parfaitement plausible. Il faudrait pour lécarter retrouver le cur de Louis Joseph et pouvoir lidentifier de façon irrécusable.
Une curieuse histoire de cheveux
Dans sa relation des événements, Damont déclare (page 37) : Cest là, présent à lopération, que je priai M.Pelletan de me donner des cheveux,
, ce quil maccorda. Dans sa deuxième déposition, il précise (page 38) : quil reçut de M.Pelletan une touffe de cheveux quil a enveloppée dans un journal de ce temps-là. Après la restauration, Damont est venu trouver Pelletan afin dobtenir de lui une authentification de ses reliques capillaires (page 38).
Or Damont a voulu offrir ces cheveux à la famille royale. Il raconte en détail sa démarche dans sa déposition du 16 août 1817 au ministère de la Police générale (R.Chantelauze, Louis XVII, Firmin-Didot, Paris, 1884, Appendice, pp. 462 à 466). Il fut donc convoqué chez le duc de Grammont, capitaine des gardes du corps de S.M.. Celui-ci à lexamen des cheveux, prétendit que ce nétait point les cheveux du Dauphin ; quils étaient dun blond plus clair ; quil avait eu loccasion de le bien connaître, sa belle-mère ayant été gouvernante des enfants de France.
Chantelauze ajoute en note : le duc de Grammont aurait dû savoir, ce qui nest ignoré de personne, que les cheveux blonds dun enfant peuvent passer au brun le plus foncé, à mesure quil avance en âge, et que ce changement se produit très fréquemment.
Il est exact que beaucoup denfants naissent blonds et que leur chevelure devient châtain, voire châtain foncé, lorsquils grandissent. Mais cela nest pas le cas pour les vrais blonds, tels que létaient Madame Royale et Louis Charles, qui tenaient leur chevelure blond cendré de leur mère. Et cela, Chantelauze ne pouvait pas lignorer. Sa remarque na donc aucune valeur en ce qui concerne Louis XVII.
Il en résulte que les cheveux conservés par Damont depuis lautopsie ne provenaient pas de la tête de Louis Charles et cet élément à lui seul est une preuve que lenfant autopsié le 9 juin 1795 nétait pas Louis XVII.
Ce qui réduit à néant les arguments (sic) de M. Delorme.
En page 20 du Mémoire écrit par Marie Thérèse Charlotte de France (Plon, Paris, 1756), la princesse écrit : Il était extrêmement engraissé, mais pas très grandi. Il ne lui aurait pas échappé que les cheveux de Louis Charles avaient foncé.
Mais laffaire des cheveux ne sarrête pas là !
Sur le Mémoire de la main de Pelletan en date du 4 décembre 1818 (page 135), se trouve en dernière page une note écrite par labbé Lafont dAussone, historien de la Reine, en date du 15 juillet 1836. Cet ecclésiastique était le neveu de la marquise de Talaru auquel Pelletan avait confié son Mémoire pour le communiquer à la duchesse dAngoulême. Labbé écrit : Je déclare, en outre, que le docteur Pelletan, longtemps avant la chute de Bonaparte, mavait montré le cur de Louis XVII, et sa jolie chevelure blond cendré, toute bouclée.
Doù proviennent ces cheveux de Louis XVII ?
M. Delorme pose bien cette question (page 136), mais se révèle incapable dy répondre autrement que par des hypothèses, contredites par les dires de Pelletan lui-même.
En page 116 en effet, nous lisons : Le sieur Damont
me pria de lui donner une poignée de cheveux ; ce que je fis
. à la condition de men rendre la moitié : je ne réclamai pas cette moitié, ayant le cur en ma possession. Le sieur Damont est venu réclamer mon certificat pour
appuyer la vérité, en déposant entre les mains de S.A.R. Madame la poignée de cheveux que je lui avais donnée et que jai fort bien reconnue.
Cette déposition de Pelletan est très claire :
1) Pelletan na pas pris de cheveux lors de lautopsie ;
2) Il na pas réclamé à Damont la moitié des cheveux de lenfant autopsié que celui-ci était censé devoir lui rendre ;
3) La poignée de cheveux présentée par Damont au duc de Gramont est complète et Pelletan la reconnue.
Or, la poignée de cheveux présentée par Damont a été refusée parce quelle nétait pas de la teinte de cheveux blond cendré du Dauphin.
La conclusion est claire : Pelletan est un traficant de pseudo-reliques royales.
En page 68, parlant du fils Pelletan, M. Delorme écrit : Quelle récompense chimérique peut donc espérer le détenteur des pauvres restes de Louis XVII ? Cette fausse naïveté ne peut tromper personne. Du temps même de la révolution, les reliques de la famille royale ou les objets divers provenant du pillage des châteaux royaux se monnayaient à prix dor à Paris. Leur cote na pas baissé depuis, ainsi quen témoignent les sommets atteints lors denchères publiques. Ce nest sans doute pas une récompense honorifique, mais elle est sonnante et trébuchante !
La prétendue maladie de Louis XVII
En page 12, lauteur écrit : À Versailles, puis aux Tuileries, Louis Charles rayonnait de vitalité. Cest exact, mais cette vitalité na pas pris fin le 10 août 1792. Au Temple encore, il était parfaitement sain et vif : durant le préceptorat de Simon (et en supposant que lenfant confié à Simon était bien encore Louis XVII), il courait en tous sens, riant, chantant, jouant au vu et au su de tous. Le 19 janvier 1794 ; les commisaires de la Commune de service au Temple, dont Lorinet, officier de santé, délivrèrent au couple Simon une décharge où lenfant était déclaré en bonne santé.
On ne peut donc parler dune éventuelle maladie de Louis XVII quaprès le 19 janvier 1794. Et là encore faudrait-il prouver au préalable quil sagissait bien encore de Louis XVII !
Ce qui nous laisse un délai maximum de seize mois pour lapparition et le dénouement fatal de la maladie en question.
Or le procès verbal dautopsie (Beauchesne, op. cit., Livre XVIII, page 330, note 1) termine par cette conclusion : Tous les désordres dont nous venons de donner les détails sont évidemment leffet dun vice scrofuleux existant depuis longtemps, et auquel on doit attribuer la mort de lenfant. La scrofule, forme de tuberculose, est une maladie à évolution lente. Un délai de seize mois est absolument incompatible avec la conclusion des médecins.
Cette constation est encore une preuve que lenfant autopsié le 9 juin 1795 nétait pas Louis XVII. Il est donc parfaitement abusif de parler de la maladie de Louis XVII.
En page 12, lauteur écrit : Le 9 mai (1793), le docteur Thierry prescrit aussitôt un traitement antiscrofuleux. Lhistorien Beauchesne nous donne pour les mois de mai, juin et juillet 1793 les ordonnances du docteur Thierry pour le fils de Marie-Antoinette (Beauchesne, op. cit., Documents et pièces justificatives, VII, pp. 492 à 495) : on y relève force petit lait clarifié, du miel de Narbonne, une médecine composée de follicules mannes choisis, coriandre, et sel de Glauber, des baies de genièvre, un bouillon avec cuisses et reins de grenouille, avec addition de sucs de plantes, et terre foliée minérale , un lavement «avec carraline de Corse, suc de citron et huile dolive, et du sirop vermifuge.
Tout ceci na rien à voir avec la scrofule, mais relève exclusivement de la diététique.
Un de mes ancêtres, labbé François Rozier, né en 1734, (nous descendons en ligne maternelle directe de son frère aîné, Jacques Mathieu Rozier) fut un agronome très connu et estimé au XVIII° siècle : on lappelait le Columelle français. Il contribua avec Bourgelat à la création de lÉcole vétérinaire de Lyon, dont il fut un temps directeur ; il créa le jardin botanique aujourdhui englobé dans le Parc de la Tête dOr, où se trouve son buste ; il créa aussi lÉcole dHorticulture dEcully, dans la banlieue Ouest de Lyon, qui existe et fonctionne toujours. Il fut membre, ou associé, ou correspondant dun grand nombre dacadémies en France et à létranger. Devenu curé de Saint-Polycarpe, sur les flancs de la Croix-Rousse, à Lyon, il mourut dans son sommeil, tué en 1793, pendant le siège, par un boulet qui tomba sur son lit.
Entre autres uvres, il a laissé un Cours complet dagriculture, qui avait de nombreux souscripteurs. Il sagit dune compilation sur nombre de sujets non seulement agricoles, mais aussi scientifiques, et notamment médicaux.
Dans le Tome IV, édité en 1786, en page 137, il traite de la scrofule et des écrouelles. Il dit notamment : Je dirai que le lait, dont on abuse dans certains pays froids et humides, surtout sil est grossier, contribue beaucoup au développement de cette maladie. Citant des médecins qui ont été ses correspondants, il conseille comme remèdes : longuent de tabac, lemplâtre de savon camphré, le cataplasme à la mie de pain, avec de la racine de bryone, , les feuilles de ciguë, les frictions mercurielles, lusage des eaux de Barèges, les gommes résolutives, la scille, la rue, lalcali fixe végétal, et comme remontant le quinquina tonique.
Il est clair que les prescriptions du docteur Thierry ne concernent en rien la scrofule.
Dans le Tome III, édité en 1783, il traite de la constipation. Il constate que cette affection peut occasionner de violents maux de tête, et même des coups de sang. Il préconise pour cette affection les lavements émollients, avec les décoctions de son, de graine de lin, de poirée, de pariétaire et de miel. Il y ajoute le petit lait, leau de poirée, de laitue, leau de veau légère, et la dissolution de 2 ou 3 onces de manne, avec un gros de crème de tartre, dans une pinte des boissons susdites.
Le docteur Thierry, de mai à juillet 1793, a tout simplement soigné un jeune garçon sujet à la constipation.
Il ny a pas eu de maladie de Louis XVII. Cette affirmation erronée sort tout droit du livre du docteur Petrie (J.H.Petrie, op. cit., chap.6, pp. 59 à 69).
Erreurs dans le procès-verbal dautopsie
Le procès-verbal dautopsie dit : ... un enfant qui nous a paru âgé denviron dix ans, que les commissaires nous ont dit être celui du fils de défunt Louis Capet
(Beauchesne, op. cit.). Cette procédure est tout simplement légale : le médecin légiste na pas à se prononcer sur lidentité du cadavre quil autopsie. Il reprend simplement ce qui lui a été dit. Cette déclaration ne prouve donc strictement rien quant à lidentité du cadavre.
Par ailleurs, nombre dhistoriens se sont accrochés à lâge denviron dix ans attribué par les médecins à lenfant. Cest ne pas tenir compte des faits. Tout un chacun en France savait que le petit duc de Normandie était né en 1785. Lui donner un autre âge après lavoir désigné comme le fils de défunt Louis Capet, cétait signer la supercherie et, par conséquent, prendre un billet direct pour léchafaud. Et ceci dautant plus que les médecins avaient tout lieu de penser que personne ne serait jamais en mesure de vérifier leurs dires. Ce qui, malheureusement pour eux, sest produit et a révélé le mensonge. Faite dans ces conditions, lindication de lâge ne prouve rien.
Toute autopsie commence par un examen minutieux externe du cadavre. Les médecins ont réalisé cet examen avec soin. Notons dailleurs que parmi eux se trouvait le docteur Lassus, qui était professeur de médecine légale (Beauchesne, op. cit., p. 329). Ils ne notèrent aucun signe corporel significatif sur le cadavre de lenfant. Or Louis Charles possédait des marques corporelles qui étaient de notoriété publique et que les médecins ne pouvaient pas ne pas chercher les marques dinoculation aux deux bras (connues de tout le corps médical) et le nævus maternus à la face interne de la cuisse gauche (connu du docteur Jeanroy, et vraisemblablement du docteur Lassus). Sils ne les ont pas notées, cest quelles nexistaient pas sur le cadavre.
Nous avons là une preuve supplémentaire que lenfant autopsié le 9 juin 1794 nétait pas Louis XVII.
Remarquons en outre que les docteurs, connaissant leur existence sur le vrai Louis Charles, auraient fort bien pu les imaginer : ayant relevé déjà des marques de putréfaction au ventre, au scrotum et au-dedans des cuisses (cette dernière indication prouve quils ont regardé lintérieur des cuisses, donc de la cuisse gauche), ils ne couraient aucun risque. Ces marques se trouvant dans les chairs et non dans les os auraient disparu en quelques jours. Ils ont eu lhonnêteté de ne pas le faire, alors que personne ne leur aurait reproché ce mensonge.
Le but dune autopsie consiste certes essentiellement à définir les causes du décès, mais elle doit aussi enregistrer toutes les caractéristiques qui pourraient servir, le cas échéant, à vérifier lidentité du défunt. Et il sagissait quand même du fils de Louis XVI !
Un ADN de référence douteux
Lors des analyses dADN ayant porté sur los prétendu de Naundorf, le professeur Cassiman a déclaré avoir isolé lADN de Marie-Thérèse (il sagit bien de celui de limpératrice dAutriche et non de celui de sa fille Marie-Antoinette). En réalité, daprès le rapport même du professeur Cassiman, de forts éléments de doute subsistaient dans les résultats des recherches sur cet ADN (Philippe A. Boiry, Louis XVII-Naundorf devant lADN, Presses ed Valmy, Paris, 1998, pp. 296 à 298).
Le Docteur Olivier Pascal, qui menait une recherche parallèle en France, a formulé par écrit ses doutes formels sur la validité de cet ADN (Philippe A. Boiry, On tue encore Louis XVII, Presses de Valmy, Paris, 2000, pp. 186-187)..
Résumé
En définitive, nous avons constaté :
- labsence de preuve que Pelletan ait pris le cur de lenfant autopsié le 9 juin 1795 ;
- lattestation matérielle tardive du cur dit de Pelletan depuis le 23 avril 1814, après le retour des Bourbons ;
- labsence de preuve que le cur de lenfant du Temple déposé à Saint-Denis soit le cur dit de Pelletan ;
- que lADN analysé provient dun cur denfant dorigine inconnue ;
- que cet ADN a été comparé à un ADN de référence de qualité scientifique douteuse.
Et on nous annonce à grand son de trompes médiatiques que cest bien le cur de Louis XVII et que celui-ci est donc bien mort au Temple le 8 juin 1795.
Cette annonce, qualifiée par ses auteurs dhistorique et de scientifique na strictement aucune valeur. Elle ne prouve quune chose : malgré leurs rodomontades, ses auteurs sont incapables dapporter la moindre preuve convaincante de leur prétention.
On peut remarquer pour terminer que même si ce cur comportait un ADN semblable à celui de limpératrice Marie-Thérèse, cela ne prouverait quune chose : cest quil sagit dun Habsbourg. Pour conclure à lidentité de Louis XVII, encore faudrait-il apporter la preuve quil sagit aussi dun Bourbon !
Conclusion
Contrairement aux prétentions de lauteur, cet ouvrage ne peut en aucun cas se qualifier d'historique, et encore beaucoup moins de scientifique.
Il est curieux de noter que la méthode suivie par M. Delorme est la copie conforme de celle adoptée depuis 1990 par le docteur J.H.Petrie, qui a lui aussi prétendu que son livre était un ouvrage historique et scientifique (J.H.Petrie, op. cit.) Laffirmation - erronée - de la mort de Louis XVII au Temple le 8 juin 1795, ainsi que les affabulations sur la prétendue maladie de Louis XVII, sont reprises directement du livre du docteur Petrie.
Ainsi M. Delorme déclare-t-il en page 79 que le docteur Petrie a réuni des preuves convaincantes selon lesquelles Louis XVII est bien mort au Temple. Le livre du docteur Petrie nayant été publié quen langue néerlandaise. Comment M. Delorme peut-il en juger ? Lit-il le néerlandais ? Moi qui ait fait leffort dapprendre cette langue et qui ait disséquer, phrase à phrase, louvrage du docteur Petrie, je peux affirmer que, malgré certaines recherches, son ouvrage est un florilège da-priori, derreurs, de mensonges avérés, daffirmations sans fondement, de choix arbitraires de faits et de témoignages, de fausses naîvetés, ce qui lui ôte toute crédibilité. Cest pourtant la thèse qui a valu à M.J.H. Petrie son titre de docteur et, en dépit de la sympathie que jéprouve pour ce pays, il faut dire que les autorités académiques néerlandaises nen sortent pas grandies !
Cest le docteur Petrie qui fut linitiateur de lanalyse ADN de 1998 sur un os dorigine douteuse à comparer avec un ADN tout aussi incertain, avant de passer le relais en 2000 à M. Delorme pour lanalyse du cur dorigine douteuse de Saint-Denis, objet de cette critique. La collusion entre les deux hommes est flagrante.
Quand on a raison, on na pas besoin de recourir à de tels procédés !
Michel Jaboulay
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