LA SEPARATION D'AVEC SON PERE

La vie du pays est maintenant conditionnée par la guerre que les députés et le Roi ont voulue pour des raisons opposées, les premiers pour répandre leur doctrine et le Roi pour rétablir son autorité après la défaite d'un pouvoir révolutionnaire déconsidéré...

Les faits marquants de la guerre

Les opérations de guerre tournent d’abord au désastre pour l’Assemblée. Les Prussiens ont franchi la frontière et se sont emparés de Longwy le 25 août. Le 30 août, ils ont mis le siège devant Verdun. Les troupes françaises se révèlent incapables d’arrêter son avance.
Les émigrés de l’armée des princes mettent le siège devant Thionville le 4 septembre. Le 14, l’armée prussienne franchit l’Argonne.
L’Assemblée, qui a décrété une levée de 30.000 hommes le 26 août, prépare son départ vers la Loire. Mais la Commune, qui dictait pratiquement ses ordres aux députés, décide de demeurer sur place : il est vrai qu'une telle assemblée - théoriquement municipale - n'avait guère de légitimité hors de sa ville.
Le 16 septembre, le pillage du Garde-Meuble et le vol des bijoux de la Couronne founit les moyens matériels de dissuader le duc de Bunswick de poursuivre son avancée en France. Le 20, c’est la comédie de la canonnade de Valmy : les Prussiens font demi-tour. Cette victoire (!) de Valmy prélude au reflux des troupes étrangères.

La situation militaire se renverse alors. Le 8 septembre, Lebrun, ministre des Affaires étrangères a donné l’ordre d’envahir la Savoie. Si les Autrichiens mettent le 23 septembre devant Lille un siège qu’ils lèveront le 7 octobre, le 24 septembre les troupes françaises entrent à Chambéry, sans avoir rencontré de véritable opposition.
Nice est prise et pillée par les troupes françaises le 29 septembre. Custine s’empare de Spire le 30, de Worms le 5 octobre, de Mayence le 21, et de Francfort le 23 (qu’il reperd le 2 décembre). Le 3 octobre, les Français occupent Bâle. Le 14 octobre, les Prussiens évacuent Verdun, et Longwy le 19.
La Belgique succombe à l’occupation française. Dumouriez franchit la frontière le 27 octobre et défait les Autrichiens à Jemmapes le 6 novembre. Les Français prennent Mons le 7 novembre, entrent à Bruxelles le 14, à Liège le 28, à Anvers le 30, et à Namur le 2 décembre.

Les premières annexions

Les révolutionnaires suscitent dans les territoires qui viennent d’être conquis de prétendues assemblées populaires formées d’une poignée de gens du cru, éventuellement encadrés par des patriotes venus de France.
À Nice, le 21 octobre, un groupuscule de Niçois, renforcés de Marseillais (qui n’ont donc rien à voir dans les affaires niçoises) demande la réunion de Nice à la France.
De même, une assemblée nationale des Allobroges, dénuée de tout caractère représentatif, demande la réunion de la Savoie à la France. Un décret de la Convention en décide ainsi le 27 novembre.

Tout ne se déroule pas cependant comme souhaité. Le 4 décembre, une délégation belge se présente à la Convention pour lui demander de reconnaître l’indépendance de la Belgique. Le 7 décembre les troupes françaises d’occupation répriment à Bruxelles une manifestation en faveur de l’indépendance belge.

Messianisme révolutionnaire

À l’Hôtel de Ville, Chaumette déclare, le 16 novembre, que toute l’Europe jusqu’à Moscou sera bientôt francisée, municipalisée, jacobinisée.
Par décret du 19 novembre, la Convention s’arroge le droit d’intervenir partout où les peuples voudront recouvrer leur liberté. Dans la même enceinte, Brissot précise dans un discours : Nous ne pourrons être tranquilles que lorsque l’Europe, et toute l’Europe, sera en feu.
Le 29 novembre, l’Angleterre élève une protestation contre le décret de la Convention du 19 novembre.

Les massacres de septembre

La capitale se sent menacée par l’invasion et redoute l’arrivée des troupes prussiennes et autrichiennes, qu’accompagnent des unités d’émigrés. On voit des suspects et des traitres partout.
Le 30 août, une vague de perquisitions et d’arrestations s’abat sur Paris : trois mille personnes environ sont incarcérées dans les prisons de la ville.
Le 2 septembre, un ramassis de nervis, qui seront payés par la suite, se répandent dans les prisons et procèdent au massacre de nombreux prisonniers après une parodie de jugement. Le sang ruisselle jusque dans les caniveaux. De nombreux innocents perdent la vie d’une façon atroce et, parmi eux, nombre d’ecclésiastiques.
Le 9 septembre, 53 détenus sont massacrés lors de leur transfert de Versailles à Paris.

Soulèvements contre-révolutionnaires

À Sedan, le 14 août, La Fayette essaye d’entraîner son armée à marcher sur Paris, mais il échoue. De son côté, le même jour, le maire de Strabourg, Dietrich, s’efforce de soulever les troupes de la ville contre les autorités révolutionnaires parisiennes : c’est aussi un échec.
Le 17 août, une émeute éclate dans l’Aude et s’empare de Carcassonne : il faut faire appel à l’armée pour déloger les révoltés.
Premier soulèvement en Vendée : les insurgés se rendent maîtres de Chatillon-sur-Sèvre au cri de Vive le Roi !
Le 8 septembre, une émeute éclate à Tours.
Le 22 novembre, une insurrection paysanne éclate en Beauce pour réclamer la taxation des grains : elle s’étend très vite dans les départements d’Eure-&-Loir, de Loir-&-Cher, d’Indre-&-Loire et de la Sarthe.

La lutte antireligieuse

Un nouveau serment à la liberté et à l’égalité est imposé aux ecclésiastiques le 14 août. Le 18, la Législative supprime les derniers ordres religieux, les congrégations enseignantes et hospitalières. La même assemblée, le 26 août, enjoint aux prêtres ayant refusé le dernier serment de quitter la France. Le 10 septembre, tous les objets du culte en or et en argent sont réquisitionnés. Le 20, lors de sa dernière séance, la Législative établit le divorce.

Poursuite de l’organisation du pouvoir révolutionnaire

La Commune de Paris, sous la direction de Robespierre, réclame la création d’un tribunal du peuple, le 15 août. Devant le refus de la Législative, une nouvelle délégation de la Commune revient deux jours plus tard devant l’assemblée et la menace d’insurrection. La Législative capitule et vote la mesure exigée.
Le 21 août, on inaugure la guillotine en exécutant un royaliste, Collenot d’Angremont, jugé sommairement par le tribunal criminel.
Le lendemain, la Commune exige de remplacer l’appellation Monsieur par celle de citoyen.
Sur demande de Danton, le conseil exécutif décide d’envoyer dans les départements des commissaires munis des pleins pouvoirs.
Avant de se séparer, la Législative crée le musée du Louvre le 19 septembre et organise l’état-civil le 20.
Lors de sa première séance publique, le 21 septembre, la Convention décrète que la royauté est abolie en France. Le lendemain, elle décide que tous les actes publics seront désormais datés de l’an I de la république française. Le 25, un nouveau décret proclame que la république française est une et indivisible.
Le 29 novembre, la Convention supprime le tribunal criminel créé le 17 août.

Mesures financières

La Législative met en vente, le 14 août, les biens des émigrés et ceux des communes. Le 25, toutes les redevances féodales soumises au rachat sont abolies sans indemnité.
Un premier décret sur la réglementation et la taxation du commerce des grains est voté le 9 septembre.
L’assemblée ordonne le 24 octobre l’émission de 400 millions d’assignats.

Préparation du procès du Roi

C’est le 13 novembre que la Convention commence la discussion sur le procès du Roi. Le 20, on découvre aux Tuileries l’armoire de fer. Le 3 décembre, Robespierre, dans un discours à la Convention, demande la mort du Roi. Le 6, sur proposition de Marat, la Convention adopte la procédure de vote lors du procès du Roi : appel nominal et vote à voix haute, ce qui permet d’exercer toute pression sur les députés.
Le 11 décembre, Louis XVI comparaît à la barre de la Convention.

La vie au Temple

Transfert dans la grande tour

Louis XVI, sur décision de la Commune, est transféré seul dans la grande tour le 29 septembre, après le souper. Seul Cléry, le valet de chambre du Dauphin, qui servait alors aussi le Roi, obtient de l’accompagner. Mais l’appartement du second étage n’était nullement prêt : il ne comportait pour tout mobilier qu’un seul lit. Cléry passa cette première nuit sur une chaise.
Les municipaux en profitent pour se livrer à une perquisition en règle au cours de laquelle ils confisquent l’argenterie et les accessoires pour la bouche. Ils s’emparent aussi du papier, de l’encre, des plumes et des crayons.
Le lendemain matin, Cléry se voit interdire de se rendre dans la petite tour pour s’occuper du jeune prince. Pour son déjeuner, le Roi reçut un morceau de pain sec et une carafe de limonade : il partagea ce repas spartiate avec son valet. Louis demande ensuite de disposer de quelques livres et un commissaire accompagne Cléry dans la bibliothèque.
Marie-Antoinette parvint néanmoins à obtenir que le Roi puisse voir sa famille quelques instants : le dîner est donc servi dans la grande tour, dans la chambre du Roi. Il en fut de même les jours suivants, ainsi que durant les promenades quotidiennes.
Le 26 octobre au soir, la Reine, ses enfants et sa belle-sœur sont transférés dans la grande tour. Mais le Dauphin est séparé de sa mère et installé au second étage, avec le Roi.

Une journée au Temple

Cléry se lève le premier et quitte sa chambre entre six et sept heures du matin. Il ouvre la porte à double battant qui reliait la chambre du Roi à l’antichambre où avaient dormi les commissaires qu’il réveille avant de ranger leurs lits de sangle dans une tourelle. Il entre ensuite chez le Roi avec un commissaire qui vient constater sa présence. Le valet tire les rideaux du lit, puis allume du feu dans la cheminée.
Louis XVI s’assied sur son lit, salue le commissaire s’il le connaît déjà ; sinon, il l’examine sans un mot. Cléry le chausse et lui présente une robe de chambre. Le Roi se rase lui-même, le valet tenant le plat à barbe. Ensuite Cléry le coiffe et l’habille.
Puis il réveille doucement le Dauphin et s’occupe de sa toilette, tandis que Louis XVI lit au coin du feu. Le Roi se retire ensuite dans son oratoire pour lire son bréviaire ou, le cas échéant, l’office du Saint-Esprit.

Au troisième étage, c’est Tison qui range les lits de sangle des commissaires qui ont dormi dans l’antichambre. La Reine, suivie de Madame Royale, sort de sa chambre à huit heures et examine les commissaires de service, échangeant parfois quelques mots avec eux.. Madame Élisabeth les rejoint aussitôt. La femme Tison les aide à faire leur toilette. Durant ce temps, son mari dresse la table dans l’antichambre. Les garçons de bouche amènent café, carafes de lait, corbeilles de pain et de fruits, et d’autres aliments.
Le Roi monte à neuf heures, accompagné de son fils et de Cléry, ainsi que des commissaires de service au second étage. Il déjeune rapidement, debout, d’un morceau de pain et d’un verre de limonade. Les commissaires demeurent là, le chapeau vissé sur la tête, lançant des quolibets ou posant des questions sans intérêt.

Cléry restait au troisième étage pour coiffer Marie-Antoinette, ainsi que Marie-Thérèse et Madame Élisabeth. Le Roi et son fils regagnent leur appartement. Le petit Dauphin se met alors au travail. Son père lui dispense des leçons d’histoire de France et de géographie, ainsi que les premiers rudiments de latin. À son retour, Cléry devient maître de grammaire et d’écriture. Après le travail, le jeune prince joue dans l’antichambre, surveillé par son père qui s’est de nouveau installé près de la cheminée pour lire.
La Reine et sa belle-sœur s’occupent pour leur part de l’éducation de Marie-Thérèse. À midi, quand le temps le permet et si les commissaires y consentent, la famille réunie descend se promener au jardin.

Le dîner est servi à deux heures, dans la salle à manger du Roi. Les garçons de bouche avaient préparé la table, recouverte d’une nappe damassée sur laquelle brille l’argenterie. Ils apportent les plats élaborés à la cuisine, située en bordure de la rue du Temple.
Ils servent d’ordinaire trois potages, quatre entrées, deux rôtis et quatre entremets. Le dessert se compose d’une assiette de four, de trois compotes, de trois assiettes de fruits et de trois pains au beurre.
Les jours maigres, que Louis XVI observe scrupuleusement, le menu est modifié en conséquence. Madame Élisabeth se contente alors d’un bol de café au dîner et d’un morceau de pain au souper.
Le Roi seul boit du vin, avec modération, bien qu’il soit gros mangeur. Il trouve devant lui une bouteille de champagne, des carafes de bordeaux, de madère et de malvoisie. Il découpe lui-même les viandes avec beaucoup d’adresse et absorbe force patés et brioches.
Il prend ensuite son café debout.

Louis XVI fait ensuite une partie de tric-trac, de dames ou de piquet avec la Reine ou Madame Élisabeth, tandis que les enfants jouent dans l’antichambre.
Le Roi rentre dans sa chambre à quatre heures et s’accorde une sieste. Les dames remontent dans leur appartement. Le Dauphin reprend ses devoirs et étudie ses leçons sous la direction de Cléry. À six heures, le Roi donne encore quelques leçons à son fils.
Le souper est servi à sept heures, tout aussi copieux que le dîner. Il est en général assez bref : on s’est levé tôt et la journée s’achève. La Reine déshabille son fils à neuf heures et le couche dans la chambre du Roi. Louis XVI lit jusqu’à onze heures. Cléry aide les commissaires à installer leurs lits de sangle en travers de la porte du Roi, puis se retire dans sa chambre.
Une nouvelle nuit commence….

La séparation

Renouvellement de la Commune

Le Conseil général de la Commune de Paris est renouvelé : le 2 décembre, la nouvelle Commune entre en fonction. Elle est encore pire que la précédente. Le maire Pétion est remplacé par Pache, après un très court intermède de Nicolas Chambon de Montaux, médecin-chef de l’hôpital de la Salpêtrière qui démissionne aussitôt nommé. Pierre-Gaspard Chaumette (qui, selon la mode du temps, se fait appeler Anaxagoras Chaumette) remplace Manuel comme procureur-syndic de la Commune. Jacques René Hébert est son adjoint : ce sinistre individu, qui vit bourgeoisement en manchettes de dentelle, marié à une ancienne religieuse qui lui a donné une petite fille, est le rédacteur de l’immonde Père Duchesne, une feuille truffée des pires grossièretés (largement distribuée dans l’armée).

Perquisition

Les effets de ce changement ne tardent pas à se manifester.
Le 7 décembre, une délégation de la Commune se présente devant le Roi. Un municipal lit un arrêté prescrivant d’enlever aux détenus du Temple, ainsi qu’à ceux qui les servent ou qui les approchent de près, toute espèce d’instruments tranchants, ou autres armes offensives et défensives, en général tout ce dont on prive les autres prisonniers présumés criminels.
Louis XVI tire de ses poches un couteau et un petit nécessaire en maroquin rouge dont il ôte les ciseaux et un canif. Les commissaires fouillent ensuite l’appartement et confisquent les rasoirs, le compas à rouler les cheveux, les petits instruments pour nettoyer les dents, le couteau de toilette, et divers objets d’or et d’argent. Ils perquisitionnent aussi la chambre de Cléry. Puis ils gagnent le troisième étage et se livrent à la même opération, emmenant jusqu’aux petits meubles de couture.
Un des commissaires, Sermaize, remonte pour demander au Roi de lui remettre le nécessaire. Louis XVI, assis devant la cheminée, tenait les pincettes. Il sort le maroquin de sa poche et le donne à Cléry : il contient un tourne-vis, un tire-bourre et un briquet. Les pincettes que je tiens en main ne sont-elles pas aussi un instrument tranchant ? demande le Roi sans se retourner.
Une vive discussion agite les commissaires au moment du dîner : les uns s’opposent à ce que la famille royale dispose de couteaux et de fourchettes, les autres refusent de se donner ce ridicule. Finalement, on décide de laisser couteaux et fourchettes, mais de les retirer après chaque repas.

Difficulté d’obtenir des renseignements

La Commune coupait les prisonniers de toute relation avec l’extérieur. Cléry, bien que très surveillé, arrivait à glaner quelques bribes de renseignements. Le plus inquiétant était ce qui se passait à la Convention.
Lors d’une visite de son épouse, accompagnée d’une prétendue cousine, le valet peut enfin apprendre d’elles que, sous quelques jours, le Roi serait appelé à comparaître devant l’assemblée. Toute la journée, il guette l’occasion de prévenir le Roi ; c’est seulement le soir, en le déshabillant, qu’il peut en parler au souverain en lui précisant qu’il risquait de se trouver séparé de sa famille et qu’il serait utile d’étudier un moyen de correspondre en secret avec la Reine. Le lendemain soir, Louis XVI le remercie et le prie de continuer à se renseigner autant que faire se peut.

La séparation

Le 11 décembre, à 05h00 du matin, le quartier du Temple est réveillé par des roulements de tambour. On bat la générale dans tout Paris. Des détachements de cavalerie et d’artillerie, avec plusieurs canons, prennent position dans l’Enclos du Temple.
À 09h00, le Roi monte comme à l’accoutumée chez la Reine avec le Dauphin. Louis XVI prend son dernier déjeuner avec sa famille et, à 10h00, il redescend avec le jeune prince. Celui-ci insiste pour que son père fasse une partie de siam avec lui. Le Roi y consent, mais l’enfant n’a pas de chance et perd toutes les parties : Toutes les fois que j’ai ce point de seize, je ne peux gagner la partie !
Vers 11h00, deux municipaux se présentent, disant qu’ils ont ordre de la Commune de conduire l’enfant auprès de sa mère.
À 13h00, une délégation, dont font partie Chambon, Chaumette et Santerre, vient chercher le Roi. Louis XVI monte dans la voiture du maire, qui s’éloigne, entourée d’une centaine de cavaliers, de six cents fantassins, et de six pièces d’artillerie avec leurs servants.
Le soir le Dauphin, n’ayant pas de lit, doit coucher dans celui de sa mère.

Le jeune prince

Louis Charles se porte bien. Toujours plein de vivacité et enjoué, il garde son caractère de grande gentillesse et ce charme qui lui attire la sympathie de tous, y compris de ses geôliers, dont certains s’attendrissent de le voir si beau. Il court, saute, lançe sa balle sans se soucier d’eux.
Il est en général revêtu d’un habit gris vert qui fait ressortir la blondeur naturelle de ses longs cheveux. Le col de sa chemise, largement ouvert, dégage le cou. Il porte un jabot de dentelle plissée et un gilet de basin blanc. Ses yeux rieurs d’un bleu intense, le velouté de ses joues, son sourire font la conquête de tous..
Mais la prison est humide et le Roi tombe le premier malade d’un gros rhume compliqué d’une fluxion. À force d’insister, Marie-Antoinette obtient que le docteur Le Monnier, qui avait été premier médecin du Roi, vienne au Temple, accompagné du chirurgien Robert. En réalité, Louis XVI, qui, comme son fils, avait besoin d’exercice physique, souffrait d’être privé de ses chasses. La maladie ne fut pas grave.
Puis le Dauphin est pris à son tour d’un gros rhume, accompagné d’une forte fièvre. On crut à une coqueluche. Mais ce n’était qu’une alerte passagère : il est fréquent que les enfants aient de la fièvre, ce qui est surtout, dans la nature, un signal d’alerte, fièvre qui tombe souvent aussi vite qu’elle est montée.
Marie-Antoinette fut aussi souffrante ensuite, suivie de sa belle-sœur et de sa fille.
Tout était rentré dans l’ordre lorsque le Dauphin a été séparé de son père : il a sept ans huit mois et quatorze jours.

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BIBLIOGRAPHIE : G. Lenotre et A. Castelot, Les grandes heures de la révolution , Perrin, Paris, 1962, Tome II, dont proviennent toutes les illustrations ci-dessus.