LE VIEUX DUC ET L'ENFANT

- Méchant garnement, la récréation est terminée. Depuis plus de vingt ans, tu empêches sans vergogne un vieux duc fatigué de prendre sa retraite mais cette fois-ci, ton compte est bon, tu vas enfin finir en terre comme c'est le lot commun et tu ne feras plus d'ombre à mon poulain des Asturies.

- Monsieur le duc, puis-je vous rappeler que j'ai déjà été enterré deux fois et que je commence à me lasser de cette cérémonie. Quelle rage vous prend donc de me vouloir inhumer une troisième fois. Onques ne vous ai-je empêché de gagner le juste repos auquel il est plus que temps que vous accédiez.

- Ah, Ah, faquin, tu me railles cruellement sans souci de mon grand âge alors que ton corps physique est certainement retourné en poussière depuis bien longtemps, dans tous les cas de figure !

- Justement, parlons-en de mon corps physique, vous n'en possédez la moindre parcelle même si vous avez prétendu détenir un morceau de mon coeur fossilisé, ce que vous auriez été bien en peine de démontrer. Alors, pourquoi désirez-vous si fort enterrer un enfant dont vous ne possédez aucun reste et dont vous voulez ignorer le destin réel ?

- Sois sans crainte, convenablement sépulturé sous une épaisse dalle de granit, tu ne feras plus d'ombre à mon poulain des Asturies et, dans quelques décennies, le bon peuple aura oublié le caractère symbolique de ta tombe pour croire que tu y es vraiment allongé.

- Monsieur le duc, vous allez vous rendre coupable d'un acte odieux dont même mon oncle Provence, pourtant peu regardant sur les moyens, n'avait voulu porter la responsabilité. Je reviendrai hanter votre sommeil jusqu'à ce que justice me soit rendue...